Le financement particapatif
En Suède, un magnat de la presse mène sa révolution verte.
Dernier projet de Johan Ehrenberg, entrepreneur suédois aux convictions sociales la construction d’immeubles locatifs à énergie positive grâce au financement-participatif.
IL EST L’HOMME OUI VEUT REDONNER SON LUSTRE AU MODÈLE SUÉDOIS.
Ses armes: les médias, des panneaux solaires et le crowdfunding. Le patron de presse Johan Ehrenberg vient de lancer la campagne de financement participatif de son dernier projet: la construction d’immeubles locatifs à énergie positive, autrement dit dont la consommation énergétique sera plus que compensée par les apports solaires. «Nos maisons vont nettoyer la ville en créant plus d’énergie verte qu’elles n’en consomment», assure-t- il. La première demande de terrain vient d’être déposée à Vâsteras, une douzaine d’autres groupes locaux sont déjà constitués ailleurs, en Suède, pour lancer des requêtes similaires. Tous ses projets sont financés sur le même modèle, lui assurant une indépendance totale.
Grâce à sa méthode, selon laquelle la recherche du profit est bannie, il promet des loyers au minimum 20 % moins cher que sur le marché. Lhomme est certes un entrepreneur compulsif mais dont l’objectif, affirme-t-il, n’est pas de gagner beaucoup d’argent: tous les bénéfices dégagés par ses entreprises sont aussitôt réinvestis. À 60 ans, Johan Ehrenberg se revendique socialiste «old school», vilipendant le démantèlement de l’État social.
Et reste l’icône suédoise d’une certaine gauche restée fidèle à ses idéaux.
En 1976, dans le même esprit que le magazine français Actuel – qui s’est sabordé quelques mois plus tôt -‘ Johan Ehrenberg crée son propre journal, ETC. Il devient célèbre en 1983, avec un reportage au long cours, pour lequel il a vécu six mois sous l’apparence d’une femme. Quarante ans plus tard, il reste ce débatteur infatigable. Ce qui ne l’empêche pas d’être à la tête d’un groupe qui affiche un chiffre d’affaires de plus de 20 millions d’euros, compte 170 employés, publie 17 journaux, dont deux quotidiens et une dizaine d’hebdos locaux.
Évidemment, un tel profil divise. Certains l’accusent de faire du business, voire de l’optimisation fiscale, en profitant des subventions à la presse. «Il ne crée rien, il consomme l’argent des contribuables», accuse un blog de la droite populaire. D’autres voient au contraire ce patron payé au même salaire que ses employés comme un génie qui, dès ses débuts, a montré de la gauche un visage loin du moralisme sectaire dans lequel elle s’engageait. Sa démarche est proche de la «troisième voie», celle qui avait fait le succès de la très neutre et social-démocrate
Suède à l’époque où elle s’engageait sur un chemin tortueux entre communisme et capitalisme. Depuis, la Suède a penché nettement du côté du social-libéralisme. Mais Johan Ehrenberg, lui, a gardé le même cap, s’engageant par ailleurs sur l’enjeu climatique, sa croisade depuis qu’il a installé ses propres panneaux solaires chez lui, en 2007. De fil en aiguille, il en est arrivé à créer un parc solaire puis rien moins qu’une compagnie d’électricité fondée sur le solaire, lorsqu’il a compris qu’aucune compagnie d’énergie ne le faisait car ça rapportait trop peu».
AUJOURD’HUI, ETC EL COMPTE 5000 CLIENTS QUI, ACHÈTENT DE L’ÉLECTRICITÉ VERTE,
mais il en vise 30000. Un objectif raisonnable pour cet homme de presse s’appuyant sur ses 350000 lecteurs engagés, qui sont la clé de voûte de sa démarche. « Ce qui est intéressant avec ETC, c’est que l’on combine le pouvoir des médias avec celui de réaliser des choses, comme mettre en oeuvre une politique climatique, et trouver d’autres formes de financement. Ce n’est pas le panneau solaire en soi qui est le pilier du changement, c’est le média, la conscience. Ce qui coûte cher pour un autre acteur est d’acheter un média. Moi j’ai l’ai déjà. Olivier Truc